Le monastère de Shaolin est situé au coeur de la Chine, dans
la province du Henan, sur le Mont Song (Songshan), l'une des
cinq montagnes sacrées de la Chine. Shaolin signifie « petite
forêt ».
Le monastère fut construit en 495 de notre ère par Batuo, un
moine indien, avec l'assistance de l'empereur Xiaowen des Wei du
Nord (386-534), une dynastie qui propagea le bouddhisme en
Chine. Mais la renommée du monastère est due à un autre moine
indien, grand prédicateur, Bodhidharma, qui vint en Chine en 527
et s'installa à Shaolin. Bodhidharma se rattachait à l'école
bouddhiste du Mahayana (Grand Véhicule) du nord de l'Inde, et
fut le fondateur du bouddhisme chinois Ch'an, qui deviendra le
Zen au Japon, école de méditation qui cherche à retrouver
l'essence universelle considérée à la fois comme principe de
toute existence et de toute bodhéité. On raconte que parvenu au
Monastère Shaolin, Bodhidharma resta neuf ans en méditation face
à un mur, pour abstraire l'idée du monde extérieur. Et la
légende lui prête l'invention du Wushu : les moines passant de
longues heures à méditer immobiles avaient besoin d'exercice à
la fois pour fortifier leur corps et leur faculté de
concentration. Il y introduisit l'idée que les Arts Martiaux
visaient au développement harmonieux de l'esprit et du corps. Il
mit au point le Xingyiquan, boxe de la forme et de la volonté
qui serait l'ancêtre du Wushu maintenant divisé en de nombreuses
écoles.
Cette technique fut, à l'origine, secrète : les moines
craignaient qu'on l'utilise à de mauvaises fins. Elle fut
d'ailleurs vite détournée ; au début des Tang les moines de
Shaolin se rendirent célèbres en apportant leur concours à
l'empereur Taizong (règne 627-649) au moment où il fonda sa
dynastie (cet épisode est dépeint sur une fresque de période
Qing du monastère). Shaolin abrita ainsi jusqu'à 5000 moines
guerriers, en fait un bataillon impérial, souvent utilisé dans
les luttes intestines. La Boxe de Shaolin se répandit alors et
vécut un âge d'or de plusieurs siècles, des Song aux Qing
(960-1911) quand elle devint un art d'attaque et de défense.
Aujourd'hui les arts martiaux se divisent généralement en
trois catégories : la boxe ou exercices à mains nues, les
exercices avec armes et les exercices de combat. Il semble
évident que les moines ne les pratiquaient pas tous mais se
spécialisaient seulement dans une ou deux disciplines. Il en est
de même aujourd'hui.
Détruit partiellement à plusieurs reprises, abandonné,
incendié par les Mandchous, le Temple de Shaolin fut chaque fois
restauré. Peu à peu, sa renommée s'étendit à toute la Chine.
Douze empereurs y vinrent en pélerinage. Les moines devinrent
des personnages légendaires.
En 1928, le Temple fut incendié par les gardes rouges. La
plupart des moines s'enfuirent à travers le pays. Seuls
quelques-uns survécurent dans les ruines. Les manuscrits avaient
brûlé mais grâce à la tradition orale, l'esprit de Shaolin fut
sauvegardé. A la fin des années 70, le monastère fut rebâti dans
toute la splendeur que l'on peut admirer aujourd'hui. Les moines
reconquirent leur temple et ses terres environnantes. Les plus
âgés furent très recherchés afin de perpétuer les rites anciens.
Aujourd'hui, une centaine de moines vivent dans le Monastère
dont 80 moines contemplatifs et 30 moines combattants. Ce qui
est bien peu par rapport aux 1500 moines qui y vivaient à
l'apogée du Temple.
Plus de 1200 adeptes de tous âges, désireux d'acquérir un
enseignement spirituel et physique, sont initiés par des maîtres
aux secrets du combat et à la religion bouddhiste et taoïste.
Bien sûr, tous ne deviendront pas moines, mais le diplôme
chinois d'Arts Martiaux qui sanctionne leur enseignement - le
meilleur du pays - leur permet de professer à leur tour dans les
académies chinoises de kung-fu, de devenir garde du corps ou
encore membre d'une troupe de parade. Ils deviennent l'élite du
pays et toutes les portes s'ouvrent devant les jeunes diplômés.
Le Monastère de Shaolin, lieu magique et mystérieux, est
visité par plus de 2 millions de touristes par an. Ils génèrent
autour du Temple de Shaolin une industrie du souvenir prospère.
Ils peuvent y admirer les fresques retraçant l'histoire
mouvementée du Temple, la Forêt aux Pagodes où les élèves
dressaient des monuments à la mémoire de leurs défunts maîtres. |